vendredi 27 novembre 2015

Daesh et le droit international : non, ce n'est pas une organisation criminelle

Je ne partage pas l'analyse de Marie- Laure Basilien- Gainche quant à son approche de la qualification juridique de Daesh (http://www.lemonde.fr/politique/article/2015/11/19/etat-d-urgence-une-marge-de-man-uvre-bien-trop-large-est-offerte-aux-autorites_4813627_823448.html).

C'est regrettable que de tels propos soient tenus dans un article du Monde, cela pouvant entrainer une confusion et de l'incompréhension dans l'esprit des lecteurs non avisés. C'est la raison pour laquelle il me semble nécessaire d'effectuer une petite clarification.

Tout d'abord, il faut rappeler que le droit international prévaut sur le droit interne, et que Daesh tombe sous la définition d'un "groupe armé non étatique".
Cette définition, prévue par l’article 1er du Titre 1 du Protocole second additionnel de 1977 aux Conventions de Genève du 12 août 1949, est la suivante : "groupes armés organisés qui, sous la conduite d'un commandement responsable, exercent sur une partie de son territoire un contrôle tel qu'il leur permette de mener des opérations militaires continues et concertées."

Le Bureau des Affaires Humanitaires de l'ONU reprend l'esprit de cette définition en les termes suivants : "Un groupe armé non étatique est un groupe capable d’utiliser les armes et la force pour atteindre ses objectifs politiques, idéologiques ou économiques, qui échappe au contrôle de l’État ou des États dans lesquels il est actif, et qui ne fait pas partie de la structure militaire officielle d’un État, d’une alliance nationale ou d’une organisation intergouvernementale."

Ainsi, Daesh, groupe armé non étatique, est du ressort du droit international. La France ne fait que respecter la hiérarchie du droit.

Qualifier Daesh d'organisation criminelle, et ne pas faire la distinction avec un groupe armé non étatique est une méconnaissance regrettable du droit international. La distinction est essentielle, tout autant que les conséquences qui en découlent.

Daesh n'est pas une organisation criminelle : elle concurrence les Etats où elle agit, et n'a pas pour objectif le seul profit financier.

Par ailleurs, si la France la qualifiait d'organisation criminelle "simple", elle ne pourrait nullement poursuivre des opérations militaires à son encontre sur des territoires étrangers. Il faudrait alors se contenter d'appréhender les individus en France, ou demander leur extradition aux Etats dans lesquels ils agissent. . . . . Ce qui semble peu envisageable dans l'état actuel des choses.

La véritable question qui se pose avec les actions de plus en plus courantes de ces groupes armés non étatiques (GANE), est leur prise en charge par le droit international, et plus particulièrement le droit des conflits armés, et le droit humanitaire.

Ces droits prévoient des cadres juridiques que ces groupes ne respectent absolument pas, alors que les Etats qui luttent contre eux ont l'obligation de les respecter.

Il serait alors plus que souhaitable que les textes internationaux évoluent avec la réalité d'action de ces GANE, cela permettant aux Etats concernés d'agir avec plus de cohérence face à ces acteurs internationaux émergents.

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